arbustes du jardin de La Rose Verte

jeudi 19 novembre 2015

Encore... jusqu'au bout!

Un érable japonais vient d'arriver au jardin, le dernier d'une petite série. Il faut avoir le goût du défi, beaucoup de détermination et de travail pour envisager une telle collection dans un jardin du Roussillon.

Un Acer shishigashira , très bien emballé et livré avec grand soin.

J'ai la chance d'avoir eu le temps de créer de nombreux jardins.
Celui-ci est le cinquième de ma vie d'adulte et le plus grand jamais entrepris.
Ce petit arbre qui vivra dans un grand pot, nous servira aussi cette année, d'arbre de Noël, qui symbolise avant tout pour moi, la fête de la lumière.

Déballage express, comment résister?!

J'émerge tout juste du chaos et des ténèbres. C'est la première année de ma vie où à plusieurs reprises, dans mon pays, où je suis née et où je vis, je suis confrontée à la barbarie.
Mais je sais bien que celle-ci ne se tait jamais et qu'ailleurs, où nous évitons de trop poser le regard, elle n'a jamais cesser d'exister et j'ai déjà honte et mal de le savoir.
Je m'élève depuis toujours contre toutes les barbaries avec mes modestes moyens, ceux que je maîtrise un peu: le savoir et la culture partagée, la beauté sous toutes ses formes.
Je le fais avec les techniques où je suis le plus à l'aise: le jardinage et la photo, parfois la poésie.
La plupart des jardins que j'ai mis en place étaient en quelque sorte, publics, en plein coeur de villes, au pied d'immeubles délabrés, en regard d'arrêts de bus.
C'est dans ces jardins que j'ai vérifié l'impact de la beauté de la nature: en plantant des bulbes sous la neige, en me levant de grand matin pour repiquer des centaines d'oeillets d'Inde semés par mon père lui aussi jardinier, en travaillant avec mes voisins pour faire naître un espace de vie végétale autour d'un minuscule parking, j'ai réalisé que sans rien dire, sans rien faire d'autre que de modifier ce que nous avions sous les yeux, j'apportais beaucoup plus de réconfort à moi comme aux autres que ne l'auraient fait de longs discours.

Inspection sanitaire, incontournable: c'est quoi encore ce truc? 

Cette fois-ci , le jardin de La Rose Verte est à la fois public et privé.
J'ai eu le projet fou et la grande ambition d'ouvrir modestement tout notre jardin. Non pas pour m'en glorifier mais pour montrer que même ici, on pouvait créer un jardin agréable pour s'y promener et même y vivre, sans pesticides et en utilisant le moins possible d'eau.
L'âge et une santé que je souhaiterais meilleure étaient sur le point de me détourner de ce projet.
Vous avouerai-je que cette horreur , encore si proche, a tout changé!
J'ai été bouleversée, d'autant que Paris est la ville qui m'a vu grandir, celle où j'ai vécu ma vie toute neuve de jeune adulte, celle où j'ai découvert la musique et particulièrement le rock. Nul doute que si j'avais eu 20 ans, j'aurais été moi aussi, ce vendredi , au Bataclan.
Paris est une ville magique, pleine de vie, d'idées neuves, de différences si enrichissantes.
On s'y sent vivre fort, on y côtoie les meilleurs d'entre nous, on frôle parfois leurs étincelles à un concert, dans un café, sur un banc, dans l'île de la Cité au petit jour ou tard le soir à la sortie d'un cinéma... partout en fait! et c'est comme cela depuis toujours!
Paris ne se raconte pas, c'est comme une connivence, ce petit quelque chose qui fait naître l'amitié et même le brasier de l'amour.
Je me souviens , assise en pleine nuit sur les marches de l'Odéon , avoir tapé sur une vielle machine à écrire dénichée aux puces, ce que je prenais pour mes premiers poèmes.
J'en écris encore ici, parfois même au jardin mais rien n'égale la féerie de Paris.
Ainsi, j'ai réalisé en retournant bien plus tard une pochette de disque, que ce grand gars avec un foulard en rouge, qui en Gare du Nord, m'avait appris la guitare à la main, à chanter son 'Coup de blues', était tout simplement Jacques Higelin.
De belles charpentières déjà, il fera un bel arbre de lumière... bien sûr, je vous le montrerai! 

Je suis loin de la ville lumière à présent et pour toujours. Si vous saviez comme le soleil et le ciel bleu du Roussillon m'agacent ces jours-ci, c'est comme s'ils m'éloignaient encore plus.
Qu'aurais-je fait ou écrit ou dit d'autre si j'avais vécu là-bas sous cette lumière si différente?
Ici elle tabasse toutes les couleurs, écrase les nuances, m'oblige à photographier très tôt ou en fin de journée.
Le soleil est loin d'être l'ami du jardinier comme du photographe amateur.
Que faire ici, passée cette intolérable minute de silence assourdissante de tous ces cris à jamais tus?
Eh bien, je me suis dit que j'allais reprendre mon travail de partage, d'échange et d'ouverture, que j'allais de nouveau, encore et encore essayer d'augmenter peu à peu l'espace public de ce jardin.
Tout simplement parce que la beauté de la nature, la sérénité qu'elle nous apporte, le réconfort qu'elle nous procure ne peuvent être réservés à ceux qui ont la chance d'avoir un jardin, petit ou grand.
Quand je travaille au jardin et je le fais tous les jours, toute l'année, pratiquement par tous les temps, il règne alentours un silence d'une qualité exceptionnelle, à peine troublé par les discrètes preuves de la vie animale ou les mille et une façons qu'à le vent de se faire exister.
Le village ne vit que très tôt le matin ou tard le soir et encore. Ce n'est guère que le coeur du village qui s'anime et quelques petites routes où circulent trop vite les voitures.
J'entends aussi le train au passage à niveau, à 5 km de là et la tramontane parfois m'apporte les cris et les rires des enfants en récréation.
il lui restait quelques feuilles dorées, ici ou là


Certains jours ce silence me pèse beaucoup même si j'entretiens de longues conversations avec mes chers rosiers.
Il manque d'autres pas que les miens sur les gravillons et les écorces de pin, quelques bavardages, des exclamations de surprise, des intonations étonnées et puis des rires aussi! Parce que même maintenant alors qu'il est loin d'être abouti, tous ceux qui arpentent le jardin s'y sentent bien! Ce coin de nature a de l'amour pour les Hommes, je l'ai senti tout de suite, dès la première fois où j'y ai marché.
et déjà de nombreux bourgeons.
Ce blog va vivre un peu plus, je vais ajouter des photos ici et là mais je serai plus souvent dans mon jardin que dans les vôtres, virtuels. Cela m'ennuie beaucoup mais il me faut choisir.
j'ai écrit ce billet avec un feutre qui glisse bien et me permet d'écrire librement sans me préoccuper des touches du clavier... que je ne peux pas encore emporter ici ou là, au jardin comme ailleurs, de nuit comme de jour, à mon bureau ou sur le guéridon du Patio parmi les feuilles dorées de la glycine. Parfois aussi j'écris à la tombée de la nuit, le cahier calé sur les genoux comme maintenant.
Tiens , il est temps d'achever ce billet- fleuve, j'entends la mule qui quitte son champ à regret et s'obstine à vouloir y demeurer.
Le 'bourrat' entêté mais si endurant est le symbole catalan.
C'est peut-être cette obstination qui va m'aider à aboutir ce ' jardin partagé' et non pas visité.
Pour l'instant, outre une parcelle qui donne directement sur la rue, le jardin ouvert librement au public est séparé du jardin privé par des clôtures et des portails.
J'espère bien pouvoir les entrebailler peu à peu.
Les endroits inachevés seront bornés par de légères claustras en ferronnerie, celles qui soutiennent si joliment certains rosiers un peu folâtres.
Bien sûr , je serai encore et toujours au jardin en même temps que d'autres y seront... je vous raconterai les évolutions.  Allez, j'y retourne... à bientôt!

Il a 7 folioles, c'est un chiffre que j'aime bien!

6 commentaires:

  1. Oh Lina! Que du bonheur de te lire !Ton billet est chargé d'optimisme (ç'est mon impression)et permets moi de dire que tu es un peu comme le "bourrat"quand tu as quelque chose en tête .......il va aboutir ce jardin que tu souhaites !
    Merci pour ces lignes elles sont déjà un beau partage de vie .

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    1. C'est sûr, j'ai toujours su ce que je voulais peut-être d'ailleurs plutôt ce que je ne voulais surtout pas! Je ne sais si le jardin va aboutir mais il est certain que je vais tout faire pour. C'est moi qui te remercie de prendre à chaque fois le temps et le peine de laisser un gentil commentaire. cela m'aide à avoir envie d'écrire! Bisous

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  2. Une bien jolie façon de vivre et vivre encore. Et de partager ce désir de vivre et la joie qui l'accompagne. C'est celle que je connais le mieux moi aussi.
    Longue vie à ce joli érable qui trouvera près de toi tous les soins et l'attention nécessaires à sa croissance ! Gros bisous Lina !

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  3. Merci de ton commentaire Marie, je suis contente de te retrouver ici... il m'est de plus en plus difficile de garder cette joie de vivre au fil des années mais je me bats! Gros bisous!

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  4. J'espère que tu nous montreras des photos de ton beau petit érable lorsqu'il fleurira et aussi lorsqu'il sera vêtu de sa belle parure automnale.
    En pot, il va se plaire et ne dit-on pas que la fortune sourit aux audacieux ?
    Ah ! Paris ! J'habite tout à côté, tu sais, j'y ai fait mes études, j'y ai travaillé de longues années, j'y vais souvent et j'ai bien aimé une phrase de notre Président de la République "Paris, ville martyrisée mais ville lumière".
    Bises et bonne soirée

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  5. Eh oui, Sylvaine, si je n'avais vilainement déserté il y a quinze ans pour suivre mon amour, je serais encore comme toi quasi parisienne. J'y ai fait comme toi quelques années d'études, j'y ai aussi travaillé et j'aimerai toujours la ville lumière ! J'espère que l'érable voudra bien s'adapter et que je pourrais partager ses différentes parures au fil des saisons... Bises et bonne journée à toi!

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