arbustes du jardin de La Rose Verte

lundi 13 février 2012

Reine

Pommier Reine des reinettes


Le froid marque un peu le pas et j’en profite pour tailler, surtout au verger !
En général, je ne taille pas à l’automne comme nombre de jardiniers le font,  la descente de sève est tardive ici, et j’attends que mes fruitiers m’indiquent clairement qu’ils sont bien au repos complet pour donner les premiers coups de sécateur.
Cette année, la douceur a persisté très tard, en décembre, les cerisiers avaient toutes leurs feuilles !
Paradoxalement, il se pourrait bien, à voir le démarrage de certains végétaux que le printemps ne tarde pas tant que ça. L’amandier par exemple, est presque en fleurs!
Je vais donc me retrouver obligée de tout tailler en même temps ;  entre les rosiers, les fruitiers, la vigne et certains persistants, il va me falloir être partout à la fois  et je n’y arriverai pas !
Donc, tant pis, pour le vent et le froid, je mets deux paires de gants l’un sur l’autre, me la joue norvégienne avec trois à quatre épaisseurs de polaires et vais quand même au jardin au moins aux heures les plus chaudes du jour et  dans des endroits au soleil de préférence !
Depuis cinq, six ans, nous avons renouvelé pratiquement tous les arbres du verger et carrément déplacé celui-ci de l’autre côté de l’allée centrale du jardin, plus d’air, plus de place, plus de soleil !
En fait, certains vieux arbres sont encore là, je répugne à les abattre tant qu’ils donnent bien même si certains ont des chancres ou un tas de bestioles et j’ai tort et je le sais mais je ne m’y résous pas !
Les poiriers ne donnent plus beaucoup sauf un énorme poirier Williams qui s’est aperçu assez tard qu’il avait largement atteint  sa maturité et devait penser sérieusement à fructifier.

Le grand cerisier Heidelberg semblait  défaillir et nous lui avons donné promptement trois remplaçants, un Montmorency pleureur, et deux beaux gobelets, l’un de cerises noires, l’autre de bigarreaux jaunes qui trompera les merles et les loriots, du moins, nous l’espérons !
Pourtant notre vieil arbre de plein vent a relevé le défi, je l’ai dépouillé de ses branches abîmées et en échange, il s’est doté de deux nouvelles charpentières qui nous ont  offert une très belle récolte l’année dernière mais il ne faut pas rêver, il a près de trente ans comme tous les pionniers du verger et s’en ira un de ces printemps prochains.
Ainsi je me suis occupée, il y a quelques jours du dernier de nos anciens pommiers, un reine des reinettes dont je flatte amoureusement les charpentières et que je nomme amicalement Reine.
Cet arbre est réellement royal, surtout au printemps lors de la floraison très ornementale.
Il attire indéniablement tous les butineurs et les abeilles se régalent en vrombissant de contentement !
C’est l’indispensable et pratiquement universel pollinisateur pour les pommiers.
Ils étaient trois, parfaitement accordés, le créateur du verger a été très prévoyant et avisé !
Trois gobelets , un Royal Gala pour les croqueurs de pommes de l’après-midi, quand la chaleur harassante de fin d’été impose une courte pause, un Belle de Boskoop pour les dévoreurs de tartes et autres pâtisseries et Reine dont les fruits se dégustent de toutes les manières, pas trop acides pour que certains les dévorent à belle dents, alors que d’autres en feront l’indispensable ingrédient du canard aux deux pommes ou de délicieuses compotes sans parler des crumbles, des chaussons, des chutneys et autres merveilles.
Ils étaient trois gobelets et le sont toujours, mais les deux jeunots qui commencent tout juste à donner ne savent pas les histoires que Reine me raconte.
Elle me les chuchote quand je la dégage du néflier du Japon son envahissant voisin, elle me les murmure quand j’arrache à son pied du lierre et de la ronce,  me les débite à la hâte pour penser à autre chose quand j’évide toujours plus son collet où le chancre s’étend impitoyablement.    
Je ne l’avais pas taillée l’année dernière, prise de vitesse encore une fois et cette année, elle a largement eu le temps de me rapporter toutes ses anecdotes, tous ses souvenirs de la création du jardin, ses histoires de motoculteur, de remorque, ses craintes de la débroussailleuse qui d’ailleurs très probablement lui fit cette blessure jamais refermée que déforme le chancre.
Quand j’ai eu fini, de jouer de la scie d’élagage, de la cisaille, du sécateur, le tas de bois était impressionnant et deux heures étaient passées.
Je lui ai laissé le moins de bois possible à gérer, tant pis pour quelques pommes perdues, je voudrais bien garder Reine encore quelques années près de nous.
C‘est qu’elle n’a pas fini ses histoires d’orages violents et de gelées tardives qui brisèrent parfois ses promesses de jeunes pommes, c’est que je ne comprends pas vraiment ce que raconte cette ancienne beauté.
Ce n’est pas qu’elle déraisonne ni ne bredouille, c’est moi qui commence à oublier le parler des arbres, c’est que moi aussi après tout, je ne suis qu’une vieille toupie !  


Fleurs blanches, boutons et revers, bords des fleurs rose vif

Un arbre très poussant même s'il y a une trentaine d'années

Un grand pollinisateur aussi!

4 commentaires:

  1. encore un ravissement a te lire
    magnifique description de Reine
    merci pour ce billet!!!!!!

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  2. C'est moi qui te remercie Nancy d'être si fidèle à mon blog...
    J'ai beaucoup de chance de vivre dans ce jardin, je ne fais que partager du mieux que je peux cette chance!

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  3. j'ai beaucoup aimé ce récit.....moi aussi , j'aime bien ma reine des reinettes.....toujours vaillante et de bonne humeur.....

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  4. Bienvenue au jardin Francette, je suis très contente de te retrouver dans notre ancien verger près de Reinette que tu connais fort bien , semble-t-il!

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